
Re-vivre
Laurent Pernot
Le contexte de la commande
En France, plus de 13 500 malades ont besoin d’une greffe d’organe chaque année. En 2010, 4 708 d’entre eux ont été greffés. L’hexagone connaît une situation de pénurie.
Aussi, la question du prélèvement a été élevée au rang de priorité nationale : chaque établissement de santé a pour mission de participer au prélèvement et de mettre tout en œuvre pour augmenter le nombre de greffes.
La loi de bioéthique du 6 août 2004, conseille, à travers l’article L1233-3 du Code de la santé publique, aux « établissements titulaires de l’autorisation, [de créer] un lieu de mémoire destiné à l’expression de la reconnaissance aux donneurs d’éléments de leur corps en vue d’une greffe ». En 2010, le conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine a réaffirmé que la société tout entière doit remercier les donneurs, vivants ou décédés et leurs proches, d’un tel geste.
Un médecin, les infirmières coordinatrices chargées des prélèvements et la directrice adjointe du centre hospitalier de Saint-Malo ont imaginé que ce lieu de mémoire pourrait être confié à un artiste. Elles se sont rapprochées d’un acteur important dans ce domaine, FRANCE ADOT 35 (Association pour le Don d’Organes et de Tissus d’Ille-et-Vilaine), membre du collectif AMIGO (Associations Militant pour le don et la Greffe d’Organes en Bretagne).
La commande
L’œuvre doit permettre d’associer le don d’organes au don de vie et rendre hommage aux donneurs et à leurs proches.
Elle doit se présenter comme un signe d’espérance, susciter intérêt et interrogations chez le public. Il est important qu’elle montre qu’une vie peut en sauver plusieurs. Emprunté par la majorité des usagers de l’établissement, le grand hall d’accueil de l’hôpital a été identifié pour son installation.
L’objectif de cette commande est que chaque personne se rendant à l’hôpital puisse prendre conscience de la nécessaire reconnaissance manifestée envers tous ceux et celles qui ont permis une transplantation et être informée sur le don d’organes.
Toutefois, l’activité du prélèvement d’organes (le centre hospitalier n’est pas habilité à greffer) étant minoritaire par rapport à l’ensemble des actions du centre hospitalier, l’œuvre ne doit pas être spectaculaire et monumentale ; il est nécessaire qu’elle trouve un subtile contraste entre visibilité et modestie.
Le premier projet
Laurent Pernot a proposé un bas-relief représentant un groupe de personnages à l’échelle 1, formant une sorte de monolithe, certains s’appuyant sur d’autres (au moyen de la courte échelle), d’autres se tenant par la main. Chaque personnage, non-identifiable, incarne un donneur anonyme et fait écho au caractère universel du don. La composition de la sculpture rappelle qu’un donneur peut sauver plusieurs vies.
L’œuvre est réalisée en résine, elle donne l’impression que les corps sortent du mur. Installée, en 2013, dans le hall d’accueil de l’hôpital elle interpelle toute personne entrant dans l’établissement.
Renouvellement de l’œuvre en hommage aux donneurs
Peu de temps après l’inauguration, en 2013, l’œuvre s’est malheureusement dégradée, notamment à cause des températures et de l’hygrométrie trop fluctuantes dans le hall d’accueil. Terrible constat : le mur a rejeté le greffon. L’artiste, l’hôpital et le médiateur se sont mis d’accord pour la démonter et la remplacer par une œuvre plus en adéquation avec cet environnement changeant.
Suggérer ce passage de vie entre celui qui part et ceux qui vont vivre
Ainsi, Laurent Pernot a créé une nouvelle œuvre qui sera installée à l’hôpital de Saint-Malo le 22 juin 2021, toujours dans le hall d’accueil, à l’occasion de la Journée nationale de réflexion sur le don d’organes et la greffe et de reconnaissance aux donneurs. Cette œuvre transcrit, comme sa première version, la générosité portée par le geste de don. On y voit deux avant-bras, se donnant la main, qui émergent d’une plaque sur laquelle est inscrit : « La transmission de la vie, c’est ce cadeau immense qui a permis à l’inconnu que je suis de revivre », comme une parole de greffé, écrite en or, à la manière d’une plaque commémorative et où l’artiste utilise le terme de « cadeau » plutôt que celui de « don ». Ces deux mains qui se touchent, comme une caresse, un geste, pour retenir, soutenir, compatir, transmettre, prendre soin, ouvrent le champ d’interprétation et prennent un sens différents selon le vécu et la sensibilité de chacun. Avec délicatesse, Laurent Pernot aborde la transmission de vie. Il rend hommage aux donneurs décédés et à leurs proches endeuillés, tout en signifiant l’importance du don et de la greffe.
Une œuvre pour remercier et sensibiliser
Le personnel chargé des prélèvements avait pour habitude de s’installer à proximité de l’œuvre lors de manifestations autour du don, l’œuvre étant devenue un support privilégié pour communiquer et échanger. Aussi, à l’occasion de la Journée nationale de réflexion sur le don d’organes et la greffe et de reconnaissance aux donneurs, organisée par l’Agence de la biomédecine en collaboration avec les associations et les établissements hospitaliers le 22 juin 2021, les infirmières coordinatrices et le médecin en charge des prélèvements inaugureront cette nouvelle œuvre, en présence de l’artiste.
Artiste :

Lieu
centre hospitalier de Saint-Malo, Ille-et-Vilaine, Bretagne
Date
2013 puis 2021
Matériaux
Bois, résine et pierre reconstituée, peinture, feuille d’or, vernis (dimensions 120x150x30cm).
Commanditaires
Nathalie Guinard, médecin coordinateur
Alexia Bizeul et Rachel Ménard, infirmières coordinatrices chargées des prélèvements
Catherine Prémel-Cabic, directrice adjointe, chargée du projet
Dominique Moreau, président de FRANCE ADOT 35
Et avec le concours de Armelle Boulvard, coordinatrice pour l’Agence de biomédecine de Rennes.
Médiation
Éric Foucault
Partenaires
Fondation de France, Fondation Daniel et Nina Carasso, ville de Saint-Malo, centre hospitalier de Saint-Malo.
Les donateurs : AMIGO (Associations Militant pour le don et la Greffe d’Organes en Bretagne), GMF, mutuelle MCD, groupe Beaumanoir, institut Georges Lopez.
Et avec le concours de l’Agence de la biomédecine et de FRANCE ADOT 35.